Demande tardive d’inscription à l’ordre du jour : le syndic ne peut pas être tenu responsable du défaut d’inscription de la résolution

En application de l’article 10 du décret du 17 mars 1967, chaque copropriétaire a la possibilité de solliciter l’inscription de résolutions complémentaires à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale.
Pour cela, certaines conditions doivent être respectées. Notamment, depuis la modification de l’article 10 par le décret du 27 mai 2004, le syndic peut refuser d’inscrire à l’ordre du jour de l’assemblée générale les demandes de résolutions formulées trop tardivement.
Cette règle a fait l’objet de plusieurs arrêts récents, qui sont l’occasion de rappeler le régime applicable aux demandes d’inscription de questions complémentaires à l’assemblée générale.
Avant l’entrée en vigueur de sa nouvelle rédaction, l’article 10 prévoyait la possibilité pour les copropriétaires et le conseil syndical, dans les six jours suivant la notification de la convocation à l’assemblée générale, de solliciter l’envoi par le syndic d’un « ordre du jour complémentaire ». Du fait des inconvénients et des difficultés causés par ce dispositif, le législateur a décidé d’amender cette possibilité.
Désormais, l’article 10 du décret du 17 mars 1967 prévoit :
« À tout moment, un ou plusieurs copropriétaires, ou le conseil syndical, peuvent notifier au syndic la ou les questions dont ils demandent qu'elles soient inscrites à l'ordre du jour d'une assemblée générale. Le syndic porte ces questions à l'ordre du jour de la convocation de la prochaine assemblée générale. Toutefois, si la ou les questions notifiées ne peuvent être inscrites à cette assemblée compte tenu de la date de réception de la demande par le syndic, elles le sont à l'assemblée suivante. (…) »
Seule compte la possibilité pour le syndic d’intégrer la demande de modification de l’ordre du jour au regard des contraintes matérielles mais aussi temporelles liées à la convocation et à la tenue de l’assemblée générale. Cela permet de simplifier les processus de convocation et de fixation de l’ordre du jour, au regard notamment des obligations légales et réglementaires pesant sur le syndic.
Il est en effet rappelé que le syndic a l’obligation de notifier les convocations à l’assemblée générale au moins vingt-et-un jours avant la date de la réunion[1]. Ce délai est un délai d’ordre public[2] et la sanction du non- respect du délai règlementaire est la nullité de l’assemblée générale en son entier[3]. En conséquence, le syndic qui ne respecte pas ce délai commet une faute de nature à exposer le syndicat des copropriétaires au risque d’une procédure en annulation judiciaire, et d’engager sa responsabilité civile professionnelle[4].
C’est ainsi que, pour apprécier in concreto la tardiveté d’une demande de modification de l’ordre du jour, les juges peuvent évaluer si l’intégration des résolutions est de nature à retarder l’expédition des convocations et empêcher le syndic de respecter le délai de vingt-et-un jours.
Le tribunal pourra aussi prendre en considération :
- L’anticipation d’éventuels dysfonctionnement de la Poste, lesquels ne peuvent constituer une cause d’exonération de la responsabilité du syndic[5] ;
- Les délais d’envoi rallongés du fait de la domiciliation de certains copropriétaires à l’étranger[5] ;
- Le fait que les convocations papiers ont déjà été imprimées et que l’intégration de nouvelles résolutions emportait des contraintes matérielles trop importantes, notamment au regard du nombre de pages, à la fois de la convocation et mais aussi de l’ordre du jour complémentaire[5] ;
- Les coûts supplémentaires de reprographie et d’affranchissement imposés à la copropriété[5].
Ainsi, la Cour d’appel de Colmar a rappelé, dans un arrêt du 11 septembre 2025, qu’« il résulte de la combinaison des articles 9 et 10 du décret précité que, lorsqu’une assemblée générale est prévue, il est nécessaire de transmettre la question au syndic avant l’expiration du délai dont dispose le syndic pour convoquer l’assemblée générale et envoyer l’ordre du jour »[6].
La Cour d’appel d’Aix en Provence a aussi pu juger, dans un arrêt du 11 avril 2024, que la demande formulée par un copropriétaire le même jour que l’envoi des convocations était trop tardive : « Par courriel du 27 juillet 2018, il était demandé au syndic de copropriété, pour le compte de M.[W], d’inscrire à l’ordre du jour la résolution suivante : « ratifier les travaux d’ouverture entrepris et autoriser la poursuite des travaux aux conditions qui seraient éventuellement fixées par l’expert judiciaire actuellement désigné. (…) Le syndic justifie qu’il ne pouvait cependant la porter à l’ordre du jour de l’assemblée générale du 27 août 2018 puisque qu’elle était trop tardive, les convocations ayant été envoyées le 27 juillet 2018. »[7]
⚠️ Il convient de rappeler que, même en cas de notification tardive, le syndic aura l’obligation d’inscrire les résolutions complémentaires à l’ordre du jour de l’assemblée générale suivante, comme cela est prévu par l’article 10 du décret du 17 mars 1967 et rappelé par la jurisprudence de la Cour d’appel d’Aix en Provence. A défaut, il engagera sa responsabilité.
[1] Article 9 du décret du 17 mars 1967
[2] Civ. 3ème 7 décembre 1971, JCP 1972 II. 170001
[3] Jurisprudence constante : Civ. 3ème 3 octobre 1974, D 1975. 130. ; JCP 1975 II. 18007, note Guillot.
[4] Cour d’appel de Paris, 6 mars 1992, Administrer 7/1992. 51 ; Loyers et copr. 1992, n°228.
[5] Tribunal judiciaire de Nanterre, Référés, 8 juillet 2025, 25/01213
[6] Cour d'appel de Colmar, ch. 2 a, 11 sept. 2025, n° 23/01000.
[7] Cour d’appel d’Aix en Provence, Chambre 17, 11 avril 2024, n°21/02852